Tuesday, April 21, 2009

Non réconciliès

Portrait de Jean-Marie Straub (Pierre Grise Distribution)

Le genou d'Artemide (Pierre Grise Distribution)

Itinéraire de Jean Bricard (Pierre Grise Distribution)

Le Streghe, Les Femmes entre elles (Pierre Grise Distribution)


Voir un film des Straub (même depuis la disparition de Danièle Huillet, on dira toujours les Straub, "l'injustice" demeurait déjà de son vivant au point de "réduire" le couple Straub / Huillet) restera toujours une expérience.
Unique.
D'une certaine façon ce cinéma nous nettoie les yeux et les oreilles depuis plus de 40 ans !
Comme si nous devions voir les choses pour la première fois, comme si elles n'avaient jamais été enregistrées avant eux. Il en est de même pour les rares mouvements de caméra, jusque dans leur fameux pano de 360° (sorte de signature).
A voir les 3 films que sort Pierre Grise Distribution, (2 signès par le seul Jean-Marie et la pièce centrale de JMS et DH), nous sommes en terrain familier et face à une oeuvre qui se défriche devant nous. Première fois.
C'est ce que décrivait dans un livre remarquable le critique de cinéma Louis Seguin:
(...) Le cinéma de Straub et Huillet est un cinéma classique. Il filme au plus juste, retient ses effets et se méfie de l'emphase. Il prend son temps et mesure les intervalles de son espace. Sa dépense est trop intègre pour se complaire dans les apparences du gaspillage.
(...) S'il prend ses distances, ce n'est pas avec le "monde", avec les "personnes" et moins encore avec une "histoire" dont il rédigerait, avant tout jugement, le réquisitoire, mais avec sa propre exigence. Il n'accepte pas la nécéssité et le confort de la loi.
(...) Le cinéma de Jean-Marie Straub et Danièle Huillet prend le risque de la Pensée. Il est "archaïque" les textes qu'il met en scène viennent de loin. Il ne se tient pas à l'avant-garde: il méprise les "expériences" où se préparent les techniques et les profits de l'exploitation. Il n'est pas "difficile" ou "minimal", pas plus en tout cas que Corneille, Hölderlin, Cézanne, Kafka, Brecht ou Schönberg. Il est exigeant: il traite avec son public d'égal à égal. Il ne mâche pas les mots et ne facilite pas le travail.
(...) Danièle Huillet et Jean-Marie Straub n'ont à offrir que l'intelligence de leur fureur. Ils ne sont pas "réconciliés" et refusent de se repentir.
En témoignent ces trois films magnifiques !

Trois films de Jean-Marie Straub (Pierre Grise Distribution - Sortie le 8 avril 2009).
Oeuvre intégrale en Dvd aux Editions Montparnasse.
Louis Seguin "Aux distraitement désespérés que nous sommes..." 1991 Editions Ombres.

En sortant de la projection l'autre après-midi des 3 films de Jean-Marie Straub, je me mis à penser, peut être par connection pas "maline", à un autre cinéaste lui aussi quelque peu "sacrifiè" et sans doute loin d'être réconcilié. A tel point qu'il ne tourne plus aujourd'hui, retape la maison de son enfance et tient un blog assez incroyable.
Depuis 2001, le cinéaste allemand Hans Jurgen Syberberg aujourd'hui agé de 74 ans (il est né en 1935 dans le nord-est de l'Allemagne) entretient une relation avec la Maison-Cinéma par l'intermédiaire de son blog qu'il illustre de photos de son quotidien (rénovation, photos d'Art, promenades urbaines, etc..), de films où l'on peut découvrir, entre autre, l'aube se levant sur cette maison (4 webcams) ou se connecter sur des caméras observant Berlin. Ou encore un journal composé de coupures de presse, hanté par le 11 septembre.
Surtout on peut voir quelques extraits de ses films et pour quelques euros découvrir une grande partie de son oeuvre.
Monumentale par l'ambition "L'Allemagne et ses Démons" et la forme (une centaine de courts-métrages documentaires et des "fictions", La Nuit (1984) son dernier film en 35mm dure plus de 6 heures !!!) mais surtout par l'idée d'une "Oeuvre d'Art Totale" dont il est un des plus grands disciples.
Découvrir "Hitler, un film d'Allemagne"(1977) (7h22 !!!), chef-d'oeuvre absolu et sans doute un des plus grands film politique jamais réalisé, qui fut controversé car le rôle du dictateur était "joué" par une marionnette ou encore le monologue de 4 heures (5 parties) de Pentésilée (1987/1988) relève aussi d'un choc esthètique (il rejoint les Straub sur cette idée que la Politique au cinéma c'est d'abord une esthètique) et HJS n'a jamais joué le Thèatre contre le Cinéma ou la Vidéo contre le Cinéma.
Il a inventé une forme unique où se mêlent quasiment tous les Arts et dont une visite sur son site en dévoile le caractère poétique et politique et dont témoigne un texte définitif de Jacques Spohr pour les Etats Généraux du Film Documentaire de Lussas en 2003, à lire sur le site de Lussas.
Fondamental !

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